Non, le plastique biodégradable ne disparaît pas tout seul
Part of a series of business columns in Danish newspaper Fyens Stiftstidende
Author: Camilla Haustrup Hermansen, Director of Business Development
Published: 28.07.2019
Une question revient presque toujours lorsqu’on parle de plastique, que ce soit lors d’une réunion de travail, avec des amis ou des parents : Les emballages sont-ils fabriqués à partir de plastique biodégradable respectueux de l’environnement ? Malheureusement, une seule réponse s’impose, et c’est non.
Cette réponse déçoit tous ceux qui veulent sincèrement changer les choses dans leur vie quotidienne, et c’est compréhensible. En tant que consommatrice je comprends cette déception. Ce serait formidable si tous les emballages plastiques errant dans la nature disparaissaient. Ce serait ni plus ni moins qu’un scenario de rêve. Et c’est effectivement un rêve. En tant que professionnelle je peux affirmer que le plastique ne peut pas disparaître tout seul.
Je reconnais que l’idée du plastique biodégradable est intéressante et facile à souscrire. Cette idée est très proche de l’éternelle utopie du consommateur désireux de faire de bonnes affaires capables de satisfaire ses envies sans laisser de traces et sans conséquences nuisibles et indésirables. Dans l’industrie du détail et alimentaire cette utopie consiste probablement à réaliser un matériau d’emballage compétitif et dégradable après l’usage, minimisant ainsi les risques de pollution. Imaginez si toute preuve matérielle de notre utilisation massive de plastique disparaissait comme par magie, et voilà ! Aussi fantastique que cela puisse paraître, il n’est pas réaliste de croire qu’un emballage fabriqué à partir de plastique biodégradable est en soi bon pour l’environnement.
En fait, le plastique biodégradable n’est pas adapté au système danois de traitement des déchets qui n’a pas été conçu pour traiter le compostage. Avec ce genre de système, personne ne peut tirer parti de la biodégradabilité d’une matière plastique. De plus, le plastique biodégradable ne devrait pas être utilisé pour fabriquer des emballages car non seulement il ne peut pas être recyclé avec d’autres matières plastiques mais il contamine aussi les déchets alimentaires.
J’ai constaté une confusion générale quant aux avantages et aux inconvénients de l’utilisation du plastique biodégradable. Il est important de faire la distinction entre les produits destinés aux ménages et les produits utilisés à des fins spécifiquement industrielles, comme le jardinage professionnel par exemple. Ce qui m’intéresse ici ce sont les emballages destinés aux particuliers, un secteur dans lequel le plastique biodégradable n’a pas sa place.
En mai dernier, deux chercheurs britanniques de l’Université de Plymouth ont attiré l’attention des médias en divulguant les résultats de leur étude sur le plastique biodégradable. Cette étude avait consisté à exposer des sacs en plastique (compostable et biodégradable) à trois environnements naturels différents : enterrés dans le sol, immergés dans de l’eau de mer, jetés sur le sol et laissés à l’air libre. Trois ans après, ils ont constaté que les sacs étaient restés quasiment intacts et qu’ils pouvaient même être réutilisés. Et le plus étonnant a été de constater que le sac biodégradable ressemblait toujours à un sac et qu’il pouvait transporter deux kilos de courses.
Forts de ces éléments, certains experts de l’Université de Londres ont ouvertement reproché aux fabricants de couverts et de couches « écologiques » de ne pas avoir informé les consommateurs du fait qu’un processus industriellement contrôlé dans un environnement chaud et humide d’environ 60 degrés était nécessaire pour détériorer ces produits. Bref, un processus impossible à recréer dans le tas de compost avec tous les autres déchets biologiques et de jardin.
Pour cette même raison, plusieurs experts ont affirmé que les entreprises faisant valoir leurs emballages comme compostables ou biodégradables induisaient les consommateurs en erreur. En effet, la grande majorité des emballages plastiques soi-disant biodégradables ne peuvent pas se décomposer naturellement sous peine de polluer encore plus l’environnement. Selon l’Association danoise des déchets, des produits tels que les emballages, les couverts et les capsules de café jetables fabriqués à partir de plastique biodégradable figurent sur la liste noire.
Le fait est qu’au Danemark nous avons du mal à nous débarrasser du plastique biodégradable car peu d’entreprises de recyclage sont disposées à acheter ce type de déchets pour les utiliser dans leurs usines de retraitement. En Allemagne, il existe même une loi interdisant l’utilisation du plastique biodégradable dans le traitement des déchets organiques. Par conséquent, ici au Danemark la recommandation est claire : le plastique biodégradable doit être utilisé soit comme matière énergétique (par incinération), soit comme nouvelle solution de recyclage lors de son triage avec les autres matières plastiques.
Il est important de noter ici que plusieurs alternatives existent pour remplacer le plastique traditionnel. Cependant, aucune ne peut être considérée comme réellement écologique tant qu’une infrastructure susceptible d’assurer une production ainsi qu’une collecte et un recyclage à grande échelle n’aura pas été mise en place. Au Danemark, on en est encore bien loin.
FAITS
Le plastique n’est pas qu’une simple matière plastique
Le plastique biodégradable est fabriqué à partir de biomasse, de pétrole et de gaz ou un mélange de ces éléments. Il est utilisé dans des secteurs comme le jardinage et susceptible de se décomposer dans le sol.
Aucune norme européenne n’existe pour définir le plastique biodégradable.
Le plastique d’origine biologique est utilisé notamment dans la fabrication des bouteilles de boissons gazeuses et peut être recyclé comme le plastique traditionnel.
Les consommateurs ne peuvent pas à première vue faire la distinction entre le plastique traditionnel, le plastique biodégradable et le bioplastique. En général, les différentes catégories de matières plastiques sont perçues comme une seule et unique catégorie quant à leur clarté et leur qualité, quel que soit le type de plastique.